Complément n° 2 : 4 octobre 2023 – 65e anniversaire de la Constitution française du 4 octobre 1958

Le 4 octobre 1958, il y a 65 ans, était promulguée la Constitution de la Ve République.

Après avoir été adopté quelques jours plus tôt par référendum, le texte de la Constitution française du 4 octobre 1958 a été publié, le 5 octobre 1958, au Journal officiel de la République française. Il est signé par René Coty, alors président de la République, par le Général de Gaulle, alors Président du Conseil, et par les vingt-trois membres du gouvernement.

Cette Constitution comprend, en particulier, un titre VII, intitulé « Le Conseil constitutionnel », qui définit les attributions de ce dernier et dispose que ses décisions « ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ».

La Constitution de la Ve République française du 4 octobre 1958 ne se limite pas à organiser les pouvoirs publics, définir leur rôle et leurs relations, dès lors que son préambule renvoie directement et explicitement à trois autres textes fondamentaux, à savoir la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789, le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et la Charte de l’environnement de 2004. Les règles et principes essentiels issus de ces textes touchent pour la plupart aux droits fondamentaux et aux garanties nécessaires à leur protection.

Par cette décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel a statué sur le fond en considérant qu’une loi tendant à modifier celle du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association méconnaissait un principe fondamental reconnu par les lois de la République, en l’espèce la liberté d’association, en subordonnant à un contrôle préalable de l’autorité judiciaire l’acquisition de la capacité juridique des associations.
Le Conseil constitutionnel a ainsi fondé, pour la première fois, sa décision sur les principes reconnus par le préambule de la Constitution et a conféré aux règles et principes qui y sont contenus, auparavant seulement déclaratoires, une valeur constitutionnelle. On peut ainsi dire que le juge constitutionnel s’est érigé en protecteur des droits et libertés ainsi qu’en garant de l’État de droit à partir de cette décision. C’est également à partir de cette décision que la doctrine a consacré le concept de « bloc de constitutionnalité » et, en particulier, le doyen Louis Favoreu, qui a dégagé cette expression du bloc de légalité, utilisée en droit administratif.

I. La Constitution française du 4 octobre 1958 et ses révisions

Le texte intégral de la Constitution française du 4 octobre 1958, en vigueur, à jour de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, est accessible sur le site internet du Conseil constitutionnel : https://qpc360.conseil-constitutionnel.fr/constitution-4-octobre-1958.

A. Les révisions constitutionnelles adoptées

Rappelons que depuis 1958, il a été procédé au total à vingt-quatre révisions constitutionnelles d’importance inégale. À l’exception des deux premières, les révisions ont été réalisées en application de l’article 89 de la Constitution. Vingt et une ont été approuvées par le Congrès et une seule, en 2000, par référendum, concernant la réduction à cinq ans de la durée du mandat présidentiel.

La procédure de révision de la Constitution prévue par son article 89 suppose l’accord du président de la République et du gouvernement, l’accord de chacune des deux chambres et, selon le cas, l’accord des citoyens, par référendum, ou celui du Congrès, deux chambres réunies se prononçant à la majorité des 3/5e (soit 60 %) des suffrages exprimés, étant précisé que c’est au président de la République de choisir la voie, à savoir référendum ou Congrès. L’initiative de la révision appartient soit au président de la République, sur proposition du Premier ministre, soit aux membres du Parlement. Dans le premier cas, il s’agit d’un projet de loi constitutionnelle, dans le second, d’une proposition de loi constitutionnelle. Dans les faits, les vingt-deux révisions constitutionnelles réalisées selon la procédure de l’article 89 depuis 1958 ont eu pour origine un projet de loi constitutionnelle. La révision de 1962 portant sur l’élection du président de la République au suffrage universel direct a été soumise directement au suffrage universel. Elle n’a pas emprunté la voie de l’article 89 de la Constitution mais celle de l’article 11, qui réside en un référendum décidé par le président de la République, n’exigeant pas l’accord du Parlement.

Les différentes révisions constitutionnelles de la Ve République sont les suivantes :

  • La loi constitutionnelle n° 60-525 du 4 juin 1960 tendant à compléter les dispositions du titre XII de la Constitution (pour l’indépendance des États africains et malgache membres de la Communauté) ;
  • La loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au suffrage universel (octobre 1962, par référendum en application de l’article 11 de la Constitution) ;
  • La loi constitutionnelle n° 63-1327 du 30 décembre 1963 portant modification des dispositions de l’article 28 de la Constitution (pour la modification de la date des sessions parlementaire) ;
  • La loi constitutionnelle n° 74-904 du 29 octobre 1974 portant révision de l’article 61 de la Constitution (pour l’extension du droit de saisine du Conseil constitutionnel à 60 députés ou 60 sénateurs) ;
  • La loi constitutionnelle n° 76-527 du 18 juin 1976 modifiant l’article 7 de la Constitution (pour la modification des règles de la campagne électorale des élections présidentielles – en cas de décès ou d’empêchement d’un candidat) ;
  • La loi constitutionnelle n° 92-554 du 25 juin 1992 ajoutant à la Constitution un titre : « Des Communautés européennes et de l’Union européenne » (pour la ratification du traité de Maastricht) ;
  • La loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993 portant révision de la Constitution du 4 octobre 1958 et modifiant ses titres VIII, IX, X et XVI (pour la création de la Cour de justice de la République chargée de juger de la responsabilité pénale des membres du gouvernement) ;
  • La loi constitutionnelle n° 93-1256 du 25 novembre 1993 relative aux accords internationaux en matière de droit d’asile ;
  • La loi constitutionnelle n° 95-880 du 4 août 1995 portant extension du champ d’application du référendum, instituant une session parlementaire ordinaire unique, modifiant le régime de l’inviolabilité parlementaire et abrogeant les dispositions relatives à la Communauté et les dispositions transitoires ;
  • La loi constitutionnelle n° 96-138 du 22 février 1996 instituant les lois de financement de la sécurité sociale ;
  • La loi constitutionnelle n° 98-610 du 20 juillet 1998 relative à la Nouvelle-Calédonie (avenir de la Nouvelle-Calédonie) ;
  • La loi constitutionnelle n° 99-49 du 25 janvier 1999 modifiant les articles 88-2 et 88-4 de la Constitution (modification de dispositions concernant l’Union européenne – traité d’Amsterdam) ;
  • Les lois constitutionnelles n° 99-568 du 8 juillet 1999 constitutionnelle insérant, au titre VI de la Constitution, un article 53-2 et relative à la Cour pénale internationale et n° 99-569 du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes ;
  • La loi constitutionnelle n° 2000-964 du 2 octobre 2000 constitutionnelle relative à la durée du mandat du président de la République (septembre à octobre 2000, par référendum) ;
  • Les lois constitutionnelles n° 2003-267 du 25 mars 2003 relative au mandat d’arrêt européen et n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République ;
  • La loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1er mars 2005 modifiant le titre XV de la Constitution (modification de dispositions concernant l’Union européenne – traité établissant une Constitution pour l’Europe) ;
  • La loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 relative à la Charte de l’environnement ;
  • Les lois constitutionnelles n° 2007-237 du 23 février 2007 modifiant l’article 77 de la Constitution (Corps électoral de la Nouvelle-Calédonie), n° 2007-238 du 23 février 2007 (modifiant le statut pénal du président de la République et créant une procédure de destitution par le Parlement constitué en haute cour) et n° 2007-239 du 23 février 2007 relative à l’interdiction de la peine de mort ;
  • La loi constitutionnelle n° 2008-103 du 4 février 2008 modifiant le titre XV de la Constitution (modification de dispositions concernant l’Union européenne – traité de Lisbonne) ;
  • La loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République (dont la QPC).

B. Les révisions constitutionnelles inabouties

Outre les vingt-quatre révisions constitutionnelles adoptées, quatorze projets ou propositions n’ont pas abouti.

À titre d’illustration, si dans les premières années de la Ve République, l’article 11 de la Constitution, qui prévoit la possibilité de recourir au référendum dans des cas limitativement énumérés, a également été employé le 28 octobre 1962 pour réviser la Constitution afin d’instituer l’élection au suffrage universel direct du président de la République, cette pratique contestée n’a plus été utilisée après l’échec du référendum du 27 avril 1969, relatif à la régionalisation et à la suppression du Sénat.

Par ailleurs, par souci de cohérence juridique, il a été envisagé d’inscrire l’ensemble des régimes d’exception dans la Constitution. Cette proposition avait déjà été formulée par le rapport Vedel du 1er février 1993 (Comité consultatif pour la révision de la Constitution, présidé par Georges Vedel, qui a présenté des propositions de modifications de la Constitution de 1958, consultable : https://www.vie-publique.fr/rapport/29582-propositions-pour-une-revision-de-la-constitution-rapport-au-president) et le rapport du Comité Balladur du 30 octobre 2007 (Rapport du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, consultable : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000467267). Toutefois, la constitutionnalisation de l’état d’urgence, qui avait fait l’objet de vifs débats à l’occasion de la discussion de la loi n° 2016-162 du 19 février 2016 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, n’a finalement pas abouti.

Une réforme des institutions a été présentée par le gouvernement en 2018. Après un début d’examen de la réforme par les députés, les discussions ont été interrompues. En août 2019, de nouveaux textes, constitutionnel, organique et ordinaire, ont été déposés au Parlement, mais n’ont finalement pas été discutés.

C. La révision constitutionnelle envisagée

Par un Avis, « La constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse : protéger un droit humain de portée universelle » (A – 2023 – 1), publié au JORF n° 0230 du 4 octobre 2023, texte n° 74, l’Assemblée plénière de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) du 28 septembre 2023 formule notamment une recommandation n° 1 qui consiste à recommander d’inscrire le droit à interrompre sa grossesse dans la Constitution française sans délai, en cohérence avec l’engagement du président de la République du 8 mars 2023.

Le 29 octobre 2023, le président de la République, M. Emmanuel Macron, a annoncé, sur le réseau social X (ex-Twitter), qu’un projet de loi constitutionnelle pour « graver dans notre Constitution la liberté des femmes à recourir » à l’Interruption volontaire de grossesse (IVG) sera prochainement transmis pour avis au Conseil d’État.

II. Le contrôle de conformité à la Constitution du Conseil constitutionnel et la décision de non-conformité partielle

En application de l’article 61 de la Constitution française de 1958, qui prévoit que les lois peuvent être déférées au Conseil constitutionnel avant leur promulgation par le président de la République, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat ou 60 députés ou 60 sénateurs, qui se prononce sur leur conformité à la Constitution, le Conseil constitutionnel a, en l’occurrence, été saisi par le président du Sénat.

Par une décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur certaines dispositions de la loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.

Il a affirmé qu’au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) et solennellement réaffirmés par le préambule de la Constitution, il y a lieu de ranger le principe de la liberté d’association et que ce principe est à la base des dispositions générales de la loi du 1er juillet 1901, relative au contrat d’association, et qu’en vertu de ce principe les associations se constituent librement et peuvent être rendues publiques, sous la seule réserve du dépôt d’une déclaration préalable. Ainsi, à l’exception des mesures susceptibles d’être prises à l’égard de catégories particulières d’associations, la constitution d’associations, alors même qu’elle paraîtrait entachée de nullité ou aurait un objet illicite, ne peut être soumise pour sa validité à l’intervention préalable de l’autorité administrative ou même de l’autorité judiciaire.

Si rien n’est changé en ce qui concerne la constitution même des associations non déclarées, les dispositions de l’article 3 de la loi dont le texte est, avant sa promulgation, soumis au Conseil constitutionnel pour examen de sa conformité à la Constitution, ont pour objet d’instituer une procédure d’après laquelle l’acquisition de la capacité juridique des associations déclarées pourra être subordonnée à un contrôle préalable par l’autorité judiciaire de leur conformité à la loi.

Le Conseil constitutionnel a jugé, d’une part, qu’il y a lieu de déclarer non conformes à la Constitution les dispositions de l’article 3 de la loi soumise à l’examen du Conseil constitutionnel complétant l’article 7 de la loi du 1er juillet 1901, ainsi que, par voie de conséquence, la disposition de la dernière phrase de l’alinéa 2 de l’article 1er de la loi soumise au Conseil constitutionnel leur faisant référence. D’autre part, il a jugé qu’il ne résulte ni du texte dont il s’agit, tel qu’il a été rédigé et adopté, ni des débats auxquels la discussion du projet de loi a donné lieu devant le Parlement, que ces mêmes dispositions soient inséparables de l’ensemble du texte de la loi soumise au Conseil. Enfin, que les autres dispositions de ce texte ne sont contraires à aucune disposition de la Constitution.

III. Fondamentaux à connaître sur le Conseil constitutionnel

A. La composition du Conseil constitutionnel

Rappelons que l’article 56 de la Constitution prévoit que le Conseil constitutionnel comprend neuf membres, dont le mandat dure neuf ans et n’est pas renouvelable, qu’il se renouvelle par tiers tous les trois ans et que trois des membres sont nommés par le président de la République, trois par le président de l’Assemblée nationale, trois par le président du Sénat. La procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 est applicable à ces nominations. Les nominations effectuées par le président de chaque assemblée sont soumises au seul avis de la commission permanente compétente de l’assemblée concernée.

Font, de droit, partie à vie du Conseil constitutionnel les anciens présidents de la République en plus des neuf membres précédemment évoqués ; le président du Conseil constitutionnel est nommé par le président de la République en ayant une voix prépondérante en cas de partage.

Par ailleurs, l’article 57 de la Constitution prévoit que les fonctions de membre du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec celles de ministre ou de membre du Parlement et que les autres incompatibilités sont fixées par une loi organique.

Le président du Conseil constitutionnel est M. Laurent Fabius qui a été nommé par le président de la République le 19 février 2016. Les deux autres membres nommés par le président de la République sont M. Jacques Mézard, le 22 février 2019, et Mme Jacqueline Gourault, le 1er mars 2022.

Les trois membres nommés par le président de l’Assemblée nationale sont Mme Corinne Luquiens, le 18 février 2016, M. Alain Juppé, le 21 février 2019, et Mme Véronique Malbec, le 23 février 2022.

Les trois membres nommés par le président du Sénat sont M. Michel Pinault, le 19 février 2016, M. François Pillet, le 21 février 2019, et M. François Séners, le 23 février 2022.

Les anciens présidents de la République qui font, de droit, partie à vie du Conseil constitutionnel sont actuellement M. Nicolas Sarkozy et M. François Hollande.

À retenir que ni le général de Gaulle ni M. François Mitterrand n’ont siégé au Conseil constitutionnel, à ce titre. M. Nicolas Sarkozy a fait le choix de ne plus siéger et M. François Hollande n’a pas encore siégé.

B. Les différents types de contrôle du Conseil constitutionnel

1. Le contrôle a priori du Conseil constitutionnel

Aux termes de l’article 61 de la Constitution, le Conseil constitutionnel opère un contrôle de conformité des lois à la Constitution, c’est-à-dire un contrôle des lois non promulguées. Dans la version initiale de la Constitution française de 1958, seules les quatre plus hautes autorités de l’État avaient le droit de déférer au Conseil constitutionnel, avant sa promulgation, une loi définitivement adoptée par le Parlement et, en particulier, le président de la République, le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat. Depuis la loi constitutionnelle n° 74-904 du 29 octobre 1974 portant révision de l’article 61 de la Constitution, la saisine du Conseil constitutionnel est également ouverte à au moins 60 députés ou 60 sénateurs. À retenir que les citoyens ne peuvent donc pas, pour l’instant, saisir le Conseil constitutionnel d’une loi avant sa promulgation.

À noter que le professeur agrégé de droit Denys de Béchillon a présenté au président du Conseil constitutionnel, le 21 février 2017, les conclusions de la réflexion qu’il a consacrée aux contributions adressées au Conseil constitutionnel dans le cadre de son contrôle a priori des lois, parfois appelées « portes étroites ». Ces contributions peuvent notamment émaner d’associations, de syndicats, d’entreprises, d’organisations professionnelles voire de personnes physiques. Cette réflexion a donné lieu à un document réalisé dans le cadre du Club des juristes, qui peut être avantageusement consulté à partir du site internet du Conseil constitutionnel : https://www.conseil-constitutionnel.fr/actualites/rapport-du-professeur-denys-de-bechillon.
À retenir que le Conseil constitutionnel a rendu environ 900 décisions (DC) depuis 1958.

2. Le contrôle a posteriori du Conseil constitutionnel

La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit dans la Constitution un article 61-1 qui a créé la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juill. 2008 de modernisation des institutions de la Ve République). Cette réforme ouvre aux citoyens le droit de contester la constitutionnalité d’une loi promulguée à l’occasion d’un procès. La QPC est donc le droit reconnu à toute personne, partie à un procès, de soutenir qu’une disposition législative est contraire aux droits et libertés que la Constitution garantit. Ce contrôle est dit « a posteriori », dès lors que le Conseil constitutionnel examine une loi déjà entrée en vigueur.

La QPC peut être posée au cours de toute instance devant une juridiction de l’ordre administratif ou judiciaire et à tous les stades de la procédure. Un écrit distinct et motivé est exigé pour la recevabilité de la QPC. Le juge saisi la transmet ensuite, éventuellement, à la Cour de cassation ou au Conseil d’État, qui dispose alors d’un délai de trois mois pour l’examiner et renvoyer, le cas échéant, cette question au Conseil constitutionnel. Ce dernier doit également statuer dans le délai de trois mois.

À retenir que le Conseil constitutionnel a rendu environ 950 décisions de QPC depuis 2010.

Pour approfondir cette question essentielle de la QPC, il vous est recommandé de consulter le site internet du Conseil constitutionnel qui est une véritable mine d’information, et notamment : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decisions/la-qpc.

3. Le contentieux de l’élection présidentielle, des opérations référendaires et des élections législatives et sénatoriales

Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l’élection du président de la République en examinant les réclamations, proclame les résultats du scrutin, en application de l’article 58 de la Constitution, statue, en cas de contestation, sur la régularité de l’élection des députés et des sénateurs, selon l’article 59 de la Constitution, veille à la régularité des opérations de référendum prévues aux articles 11 et 89 et au titre XV en proclamant les résultats, en vertu de l’article 60 de la Constitution.

À la suite du scrutin de l’élection du président de la République des 10 et 24 avril 2022, le Conseil constitutionnel a formulé, comme pour les précédentes élections, un certain nombre d’observations dans une décision n° 2022-198 PDR du 16 juin 2022. À cette occasion, il souligne que toute réforme éventuelle relative à cet aspect de l’élection présidentielle gagnerait à intervenir le plus en amont possible de l’échéance de l’élection suivante, ne serait-ce que pour des raisons de faisabilité de la mise en œuvre de possibles innovations. Il attire également à nouveau l’attention du gouvernement sur la nécessité, compte tenu des risques de fraudes informatiques et de l’ampleur de leurs conséquences, de n’envisager qu’avec précaution la mise en œuvre de la transmission électronique des présentations (prévue à compter de la prochaine élection présidentielle en application du paragraphe III de l’article 3 de la loi organique n° 2021-335 du 29 mars 2021).

C. Les conséquences du contrôle de constitutionnalité des lois du Conseil constitutionnel

En application de l’article 62 de la Constitution, une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61 de la Constitution ne peut être promulguée ni mise en application.

Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause.

À retenir que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours et qu’elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles.

IV. Fondamentaux à connaître sur la liberté d’association

L’article 1er de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association dispose que l’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices et qu’elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations. Cette loi encadre le fonctionnement de toutes les associations qui ont leur siège en France ou exerçant en France une activité permanente, sauf celles d’Alsace et de Moselle qui dépendent du Code civil local. Toutes les associations répondant à ce critère sont des associations dites loi 1901 et doivent la respecter ainsi que son décret d’application, celui du 16 août 1901 pris pour l’exécution de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.

La liberté d’association est constitutionnellement protégée dès lors que le Conseil constitutionnel l’a admise comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) dans sa décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971.

L’article 11 de la Convention EDH, portant sur la liberté de réunion et d’association, prévoit que toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Cet article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’État. La jurisprudence de la CEDH regarde la liberté d’expression dans la fonction publique comme une composante essentielle d’une société démocratique (CEDH, 26 sept. 1995, n° 17851/91, § 64, V. c. Allemagne ; CEDH, 10 juill. 1998, n° 26695/95, § 40, S. c. Grèce).

À retenir, d’une part, que les partis politiques, qui sont constitués sous la forme associative, bénéficient d’une protection constitutionnelle renforcée dès lors que l’article 4 de la Constitution prévoit que les partis et groupements politiques contribuent à l’expression du suffrage en se formant et en exerçant leur activité librement. D’autre part, la CEDH a jugé que l’interdiction générale et absolue faite aux militaires de créer et d’adhérer à un groupement à caractère syndical, de même que l’interdiction de principe pour un tel groupement d’agir en justice pour défendre les intérêts de ses membres, étaient incompatibles avec la convention EDH (CEDH 2 oct. 2014, n° 32191/09, ADEFDROMIL c. France et n° 10609/10, M. c. France). La Cour a toutefois précisé que des restrictions, mêmes significatives, peuvent être apportées dans ce cadre aux modes d’action et d’expression d’une association professionnelle et des militaires qui y adhèrent, compte tenu de la spécificité des missions incombant aux forces armées, qui exige une adaptation de l’activité syndicale qui, par son objet, peut révéler l’existence de points de vue critiques sur certaines décisions affectant la situation morale et matérielle des militaires. L’article L. 4121-4 du Code de la défense prévoit dorénavant que les militaires peuvent librement créer une association professionnelle nationale de militaires, régie par le titre II du chapitre VI du même Code portant sur les droits et obligations des militaires, y adhérer et y exercer des responsabilités.

Par ailleurs, une dissolution administrative d’une association peut être ordonnée dans les conditions prévues par l’article L. 212-1 du CSI. Dans ce cadre, elle intervient par décret du président de la République, en conseil des ministres, pour des associations ou groupements de fait, notamment : qui provoquent à des manifestations armées dans la rue ; qui présentent, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ; qui ont pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou d’attenter par la force à la forme républicaine du gouvernement ; dont l’activité tend à faire échec aux mesures concernant le rétablissement de la légalité républicaine ; qui ont pour but soit de rassembler des individus ayant fait l’objet de condamnation du chef de collaboration avec l’ennemi, soit d’exalter cette collaboration ; qui, soit provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ; ou qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger. Le maintien ou la reconstitution d’une association ou d’un groupement dissous en application de cet article, ou l’organisation de ce maintien ou de cette reconstitution, ainsi que l’organisation d’un groupe de combat sont réprimées dans les conditions prévues par la section 4 du chapitre Ier du titre III du livre IV du Code pénal.

À titre d’illustration, l’association dénommée « Génération identitaire » a été dissoute par un décret du président de la République du 3 mars 2021. Par une ordonnance n° 451743 du 3 mai 2021, le juge des référés du Conseil d’État a rejeté la demande de suspension de l’exécution de ce même décret qui a été confirmée par une décision n° 451741 du 2 juillet 2021, en jugeant qu’elle était bien responsable de provocations à la haine et à la discrimination. Précédemment, le Conseil d’État avait rejeté la demande de l’association « Barakacity » de suspendre l’exécution du décret du 28 octobre 2020 qui a mis en œuvre sa dissolution en la motivant par la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence (CE, juge des référés, 25 nov. 2020, nos 445774, 445984, Association Barakacity). Le 16 mai 2022, le juge des référés du Conseil d’État, statuant dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 511-2 du CJA, en formation collégiale, a suspendu la dissolution du Groupe Antifasciste Lyon et Environs (GALE) prononcée par le gouvernement, le 30 mars 2022, en estimant que les éléments avancés par le ministre de l’Intérieur ne permettent pas de démontrer que la GALE a incité à commettre des actions violentes et à troubler gravement l’ordre public. Plus récemment, d’une part, le groupement de fait « Les Soulèvements de la Terre » a été dissous par le décret du 21 juin 2023 pris sur le fondement de l’article L. 212-1 du CSI. Toutefois, par une ordonnance numéros 476385, 476396, 476409, 476948 du 11 août 2023, le juge des référés du Conseil d’État a suspendu l’exécution du décret du 21 juin 2023 et le Conseil d’État statuant au contentieux, par une décision numéros 476384, 476392, 476408, 476946 du 9 novembre 2023 rendue en section du contentieux, a annulé le décret du 21 juin 2023 portant dissolution du groupement de fait « Les Soulèvements de la Terre » D’autre part, l’association « Civitas » a été dissoute par un décret du 4 octobre 2023.

La CEDH a déjà jugé que la dissolution d’une association en raison de son idéologie raciste et xénophobe, en l’occurrence contre les Roms, n’emporte pas violation de l’article 11 de la Convention EDH (CEDH, 9 juill. 2013, n° 35943/10, V. c. Hongrie).

V. Corpus juridique de référence

  • Constitution française du 4 octobre 1958, notamment son art. 4
  • Convention EDH, notamment art. 10, 11
  • Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment art. 12
  • Déclaration universelle des droits de l’homme, Organisation des Nations unies, 10 déc. 1948
  • CEDH, 26 sept. 1995, n° 17851/91, V. c. Allemagne
  • CEDH, 10 juill. 1998, n° 26695/95, S. c. Grèce
  • CEDH, 13 févr. 2003, Refah Partisi (Parti de la Prospérité) c. Turquie
  • CEDH 22 sept. 2011, n° 29953/08, Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) et Mme L. c. France
  • CEDH, 9 juill. 2013, n° 35943/10, V. c. Hongrie
  • CEDH 2 oct. 2014, n° 32191/09, ADEFDROMIL c. France et n° 10609/10, M. c. France
  • Cons. const., 16 juill. 1971, n° 71-44 DC, Liberté d’association
  • Cons. const., 20 juill. 2000, n° 2000-434 DC, Loi relative à la chasse
  • Cons. const., 12 août 2022, n° 2022-843 DC, Loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat
  • Code pénal, notamment art. 431-13 à 431-21 ; Code de la sécurité intérieure, notamment art. L. 212-1, L. 212-2 ; Code civil local d’Alsace-Moselle, notamment art. 21 à 79-IV
  • Loi organique n° 2021-335 du 29 mars 2021 portant diverses mesures relatives à l’élection du président de la République, paragraphe III de l’art. 3
  • Loi du 1er juill. 1901 relative au contrat d’association
  • Loi n° 2021-874 du 1er juill. 2021 en faveur de l’engagement associatif
  • Loi n° 2021-875 du 1er juill. 2021 visant à améliorer la trésorerie des associations
  • CE, ass., 11 juill. 1956, n° 26638, Amicale des Annamites de Paris et sieur N.
  • CE, ass., 31 oct. 1969, n° 61310, Syndicat de défense des canaux de la Durance et Blanc
  • CE, juge des référés, 25 nov. 2020, nos 445774, 445984, Association Barakacity (Dissolution sur décision administrative)
  • CE, juge des référés, 3 mai 2021, n° 451743, Association « Génération identitaire » et autres
  • CE, 2 juill. 2021, n° 451741, Association « Génération identitaire » et autres (Dissolution sur décision administrative)
  • CE, 9 nov. 2023, n° 476384, 476392, 476408, 476946, « Les Soulèvements de la Terre » et autres
  • CE, juge des référés, en formation collégiale, 16 mai 2022, n° 462954, Groupement de fait Groupe Antifasciste Lyon et Environs (dit « la GALE ») et autre (Décret de dissolution suspendu)
  • CE, juge des référés, en formation collégiale, 11 août 2023, nos 476385, 476396, 476409, 476948, Groupement de fait « Les Soulèvements de la Terre » (Décret de dissolution suspendu)
  • CE, Jurisprudence et avis de 1999, Les associations et la loi de 1901, cent ans après, Rapport public 2000, La Documentation française

VI. Exemple de sujet avec son corrigé portant sur la liberté d’association

Sujet : La dissolution d’une association

Introduction

Annonce du plan

I. Les motifs de dissolution d’une association

Annonce des deux sous-parties

1.1. Sur décision de ses membres ou en application de ses dispositions statutaires

1.2. Sur décision de justice ou sur décision d’une autorité administrative

Transition

II. Les conséquences de la dissolution d’une association

Annonce des deux sous-parties

2.1. La liquidation et la transmission du patrimoine de l’association

2.2. Sanction pénale en cas de reconstitution d’une association ou d’un groupement dissous en application de l’article L. 212-1 du CSI

Conclusion

VII. Exemples de questions portant sur le thème de la Constitution et du Conseil constitutionnel

  • Le Conseil constitutionnel est-il une juridiction ?
  • Qu’est-ce que le « bloc de constitutionnalité » ?
  • Expliquez les procédures de révision de la Constitution.
  • Donnez des exemples de révision de la Constitution du 4 octobre 1958.
  • Sur quoi porte la prochaine révision envisagée de la Constitution ?
  • Faut-il maintenir les anciens présidents de la République comme membres de droit à vie du Conseil constitutionnel ?
  • La composition du Conseil constitutionnel est-elle pertinente ?
  • Quels sont les types de contrôle de constitutionnalité des lois par le Conseil constitutionnel ?
  • Qu’est-ce qu’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) ?
  • Qu’est-ce qu’une « disposition législative » en matière de QPC ?
  • Quels sont les « droits et libertés que la Constitution garantit » en matière de QPC ?
  • Pourquoi une QPC est-elle qualifiée de « prioritaire » ?
  • Faut-il constituer avocat pour poser une QPC ?
  • Le justiciable peut-il saisir directement le Conseil constitutionnel, en matière de QPC ?
  • Définissez la notion de « portes étroites » devant le Conseil constitutionnel.
  • Comment dissoudre une association loi 1901 ?
  • Citez quelques exemples d’associations ou groupements de fait dissous, par décret en conseil des ministres, en application de l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure, pour avoir provoqué à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens.
  • Les partis politiques constitués sous la forme associative bénéficient-ils d’une protection constitutionnelle renforcée ?
  • Que faire face à une association qui s’apparente à une secte ?
  • Quel est le rôle de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) ?
  • Citez quelques observations formulées par le Conseil constitutionnel à la suite de l’élection présidentielle des 10 et 24 avril 2022.
  • Que pouvez-vous dire du contrôle du Conseil constitutionnel sur la loi d’orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2027 ?
  • Que pouvez-vous dire du contrôle du Conseil constitutionnel sur la loi organique relative à l’ouverture, à la modernisation et à la responsabilité du corps judiciaire ?