3 octobre 2024 : Publication du rapport du CGLPL portant sur l’effectivité des voies de recours contre les conditions indignes de détention

À retenir :

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a publié, le 3 octobre 2024, un rapport thématique portant sur l’effectivité des voies de recours contre les conditions indignes de détention. Ce dernier précise qu’au 1er septembre 2024, 78 969 personnes sont détenues en France alors que la capacité d’accueil de l’ensemble des établissements pénitentiaires est seulement de 62 014 places, cette surpopulation des établissements pénitentiaires dégradant fortement les conditions de vie des personnes écrouées.

Le rapport fait ressortir que la procédure de saisine du juge judiciaire sur le fondement de l’article 803-8 du Code de procédure pénale, créée par la loi n° 2021-403 du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, qui permet à toute personne qui considère que ses conditions de détention sont contraires à la dignité de la personne humaine de saisir le juge judiciaire, est relativement peu utilisée et a, par ailleurs, des effets limités. Le rapport précise également que les recours devant le juge judiciaire, lorsqu’ils sont jugés recevables, aboutissent très souvent au transfèrement dans une autre prison ce qui permet d’expliquer que de nombreux détenus préfèrent continuer de subir des conditions de détention indignes en préférant rester à proximité de leur famille et de leurs proches.

En ce qui concerne les recours devant le juge administratif, le rapport mentionne que les requêtes en conditions indignes de détention n’ont représenté que 9 % du contentieux pénitentiaire devant le juge administratif en 2022, soit 184 requêtes sur un total de 2 032.

Afin de renforcer l’effectivité des recours, le CGLPL propose des évolutions du droit et des pratiques, et notamment de rallonger le délai d’examen du bien-fondé de la requête dans le cadre de la procédure devant le juge judiciaire, l’instauration de requêtes collectives impliquant plusieurs personnes détenues au sein d’un même établissement et une information plus systématique des détenus sur les recours existants, ainsi que la possibilité de bénéficier d’un avocat commis d’office pour obtenir des conseils juridiques et un appui dans la réalisation de leurs démarches.

Pour rappel :

Devant le juge judiciaire, un recours a été créé en réponse à l’arrêt J.M.B. c. France du 30 janvier 2020 de la Cour européenne des droits de l’homme, constatant l’absence de recours effectif permettant de mettre fin à des conditions de détention indignes dans le cadre du fonctionnement du service public pénitentiaire. L’article 803-8 du Code de procédure pénale, créé par la loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, prévoit deux procédures, à savoir : un recours présenté devant le juge des libertés et de la détention (JLD) pour les personnes en détention provisoire et un recours présenté devant le juge de l’application des peines (JAP) pour les personnes condamnées (CEDH, 30 janv. 2020, J.M.B. et autres c. France, n° 9671/15 et 31 autres)

Devant le juge administratif, trois types de recours sont susceptibles d’être intentés pour contester les conditions de détention, à savoir : le recours pour excès de pouvoir (REP), les recours indemnitaires et les procédures urgentes, et, en particulier, le référé-liberté en application de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (CJA).

Pour approfondir :

Dans la 6e édition papier de l’ouvrage Un an d’actualités des libertés et droits fondamentaux :

→ Cf. la fiche intitulée : « 6 juillet 2023 : Nouvelle condamnation de la France par la CEDH pour ses prisons indignes en raison de la surpopulation carcérale »

→ Cf. : « Que faire en cas d’atteinte à la dignité d’une personne résultant des conditions de sa garde à vue ? » ; « La mesure de placement d’un détenu en quartier de prise en charge de la radicalisation ou la prolongation de cette mesure implique-t-elle une présomption d’urgence en référé-suspension ? » dans le Pêle-mêle de questions-réponses